Patrick Keusters : « Marc Coudron n’a pas su tout faire en seize ans »

Dans moins de 3 moins, Marc Coudron quittera la présidence de l’ARBH et c’est un nouveau chapitre de l’histoire du hockey belge que devra écrire son successeur. Si Patrick Keusters est, aujourd’hui, sorti du bois, c’est qu’il est convaincu qu’il peut poursuivre, avec succès, la tâche de son prédécesseur et qu’il reste encore beaucoup de travail à accomplir pour aider les clubs et l’ensemble de la discipline à poursuivre leur développement. Juriste de formation, l’Anversois (62 ans) a effectué une grosse partie de son parcours professionnel dans le secteur bancaire. Parfait bilingue. Hommes de compromis mais franc et direct, l’actuel président de la VHL (Vlaamse Hockey Liga) nous a accordé son tout premier entretien en tant que candidat à la présidence. Une volonté assumée pour s’ouvrir aux Francophones qui ne le connaissent peut-être pas encore. L’ancien président de l’Herakles vit et respire hockey. Il est, aujourd’hui, fin prêt à assumer ses responsabilités et « à se mettre au service des membres »

Patrick Keusters, qu’est-ce qui vous a décidé à sauter le pas ?
« L’engagement fait partie intégrante de ma vie mais également de ma passion pour le hockey. J’ai été co-président de l’Herakles durant 15 ans. J’ai œuvré à la Fédération comme représentant des clubs puis j’ai occupé le poste de trésorier. Ensuite, lors de la scission, en 2012, je me suis présenté à la présidence de Vlaamse Hockey Liga. Je suis également au board de la Fédération européenne de hockey depuis 4 ans où je m’occupe des questions juridiques et de gouvernance. Il m’a donc semblé tout naturel de présenter ma candidature à la présidence de l’ARBH et de poursuivre ce parcours, vu également mon expérience professionnelle dans le management. »

L’héritage laissé par Marc Coudron ne risque pas d’être trop lourd à porter ?
« C’est évident qu’il ne sera pas simple de succéder à un homme qui laissera une trace indélébile sur le hockey belge. Son parcours comme joueur était déjà exceptionnel avant qu’il ne devienne un président emblématique. Je ne sais pas si on peut faire mieux que lui mais, dans tous les cas, on peut faire autrement. Le bilan de ce qu’il a réalisé depuis 16 ans est phénoménal. Mais on n’organise pas un concours entre présidents. J’arrive avec toute mon expérience de président de club, de ligue et de dirigeant de banque. Je ferais du mieux que je peux mais à ma façon. »

Quelles sont les qualités pour faire un bon président ?
« C’est quelqu’un qui doit pouvoir trancher mais qui doit toujours rechercher le consensus dans chacune de ses décisions. C’est une fonction non rémunérée mais qui demande énormément d’investissements et une réelle disponibilité. »

Quelles sont vos priorités si vous êtes élu à la présidence de l’ARBH ? Gérer l’après Covid-19 sera le premier chantier ?
« Avec ou sans la pandémie de Covid, la priorité absolue demeure les clubs. Il faut plus que jamais être à leur écoute et les aider dans leur croissance. Ils ont souffert et les dirigeants se débattent dans les difficultés depuis plus d’un an. Et nous n’avons toujours pas de réelles perspectives pour le redémarrage. L’avenir ne s’annonce pas simple. Il faudra donc être encore d’avantage à leur écoute même, si par nature, ce sont les ligues qui se situent en premières lignes. L’encadrement est déjà très professionnel que ce soit dans la formation des arbitres, des entraîneurs ou dans la recherche des subsides. Toutefois, ma première ambition est d’aider les clubs à encore progresser. La Fédération est une société de service. L’ambition du hockey belge et des équipes nationales passe par l’investissement des clubs ainsi que celui des membres et des bénévoles. Il ne faut jamais l’oublier. »

Une diversification de l’offre pourrait toutefois offrir de nouveaux revenus aux clubs ?
« Il y a 2 axes à cette idée. Premièrement, trouver de nouvelles activités à proposer au sein des clubs. Deuxièmement, offrir des formules pour augmenter la durée de présence des membres au sein de ceux-ci. Je crois beaucoup au développement du hockey plaisir. Nous comptons 53.000 membres mais je dirai que seulement un peu plus de 10.000 d’entre eux jouent, réellement, pour la compétition. De nouvelles offres permettraient d’exploiter un peu plus les infrastructures actuelles. Les clubs peuvent devenir de véritables centres de loisirs ou de rencontres. Auparavant, c’est le modèle hockey-tennis qui avait la cote. Mais on voit apparaître un tas de nouvelles activités dans les clubs comme des groupements de cyclistes ou le paddel qui offre des retours sur investissement extrêmement courts. Cela pourrait leur permettre de disposer de fonds suffisants pour continuer à se développer. »

La bonne entente entre l’ARBH et les 2 ligues demeure essentielle ?
« Naturellement. Ce sera d’ailleurs un de mes chevaux de batailles si je suis élu. Il faut conserver cette cohésion. Cette collaboration est vitale pour le hockey belge. Actuellement, cela fonctionne parfaitement. La scission a été accueillie avec méfiance par certains. Et à raison certainement avec des exemples malheureux dans certaines disciplines où cela a eu des répercussions négatives à plusieurs niveaux. Mais le hockey est, aujourd’hui, cité en exemple pour la réussite de cette scission qui était, je le rappelle, essentielle pour poursuivre le développement et la croissance du sport. Cela devra se poursuivre dans le futur avec des collaborations toujours plus fortes entre les entités mais surtout entre les 3 présidents et les 3 secrétaires-généraux. »

Le projet de stade national sera une autre de vos préoccupations ?
« Cela doit rester une saine ambition. Mais ce n’est certainement pas une obligation. Le stade régional de Wavre va changer la vie de la Fédération puisque nous pourrons, enfin, y organiser des rencontres internationales sans devoir monter des structures provisoires très onéreuses. Nous allons toutefois tout mettre en œuvre pour faire aboutir ce projet de stade national mais avec des perspectives sur le long terme. On parle de 5 ou 6 ans. Nous sommes coincés dans la réalité fédérale et communautaire de notre pays. »

Comment voyez-vous ces 4 prochaines années ?
« Je pense que nous allons encore supporter une croissance soutenue car le hockey répond à une demande très claire en termes de valeurs. Nous mettrons en place une série de projets et d’ambitions. Les clubs doivent se développer dans des pôles de loisirs afin qu’ils soient plus forts et plus résilients pour résister à certaines crises. Nous devons également mener toute une réflexion par rapport au hockey indoor. Il faut lui assurer une place qui correspond à l’aspiration des clubs comme nouveau pôle d’attraction alors qu’à l’heure actuelle, c’est surtout beaucoup de soucis d’organisation et peu ou pas de rentrées financières. »

Lors de notre dernier entretien, Marc Coudron nous disait « Mon successeur devra se mettre au service du hockey belge en ayant la volonté de faire avancer les choses. Il ne pourra pas simplement se contenter de gérer. » C’est également votre sentiment ?
« Oui évidemment. Il reste de nombreux chantiers sur lesquels travailler. Marc Coudron n’a pas su tout faire en 16 ans ! Il reste, ainsi, pas mal de travail à accomplir au niveau des Red Panthers qui n’ont pas encore atteint le niveau où on souhaiterait qu’elles évoluent. Je pense d’ailleurs que cela constituera peut-être l’un des seuls regrets de Marc au moment de dresser le bilan de sa présidence. »

Entretien : Laurent Toussaint, In Le Soir, samedi 13 mars 2021

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