Aisling D’Hooghe : « Les 6 pires semaines de ma vie »

Une petite dizaine de minutes après la défaite aux Shoot-outs face à l’Argentine dans la petite finale, la gardienne désormais retraitée n’a pas fui ses responsabilités. Il a pris le temps de répondre à chacune des sollicitations même si elle a été submergée à de nombreuses reprises par le surplus d’émotions, de stress et de pression des derniers jours. Comme à son habitude, Ash n’y a pas été par 4 chemins pour livrer, une toute dernière fois, son analyser sur la rencontre et sur l’issue du tournoi olympique.

Aisling, quels sont vos premières émotions à la sortie de ce tout dernier match ?
« Je suis fière. Très fière mais triste. Je ne pouvais pas rêver d’une plus belle sortie que de jouer pour une médaille aux JO. Je suis contente de mon match même si quand on prend 2 buts, on ne peut pas être la plus heureuse de tout. Nous nous sommes vraiment battues jusqu’au bout. J’étais trop heureuse et prêt pour disputer les Shoot-outs. Mais cela ne s’est pas passé comme prévu. C’est très difficile mais la semaine prochaine, je serai très fière de nous et de moi. »

Même si, il y a 3 ans, dernier carré aux Jeux, vous auriez toutes signées pour ce résultat.
« Une 4e place, cela signifie que nous aurions perdu le dernier match donc je n’aurai peut-être pas signé directement. Nous avons une très belle équipe qui pourra aller un tas de médaille. J’ai trop hâte d’être de l’autre côté, où il y a un peu moins de stress, pour crier et hurler pour elles depuis les tribunes. Car elles vont aller chercher énormément de médailles et de très belles. »

Qu’est-ce qui a finalement manqué pour vous imposer à l’issue des 60 minutes ?
« Un peu de magie ? Un peu de chance ? Un centimètre à gauche ? Un centimètre à droite ? Une seconde plus tôt ? Une seconde plus tard ? Cela s’est joué à tellement de détails. Mais c’est vrai que c’est un peu redondant de répéter cela, à chaque fois, et de dire que nous n’avons pas été suffisamment lucides dans la finition. Et ce qui est frustrant, c’est que c’est la même chose pour les Shoot-outs. On ne peut pas tout mettre à la poubelle mais il y a des choses que nous pouvons améliorer. Est-ce que c’est la gestion du stress. Ou peut-être justement pas assez de stress ? Nous sommes beaucoup trop chill et on se dit que cela va aller. Ou que celle d’à côté va le faire pour nous ? Je ne sais pas et je suis d’ailleurs bien heureuse de ne pas devoir débriefer cette partie-là. Et de le laisser gérer la suite. »

Un mot, tout de même, également sur ces 3 dernières semaines à un niveau plus personnel. Vous ne vous attendiez forcément pas à tous ces rebondissements et à disputer ces dernières rencontres.
« Ce n’est pas bien de dire cela car je termine tout de même sur le terrain mais c’étaient les 6 pires semaines de ma vie. Un montage russe d’émotions. L’annonce de la sélection a été très compliqué à avaler. Puis il faut mordre sur sa chique et continuer à s’entraîner pour être prête si besoin. Je suis arrivée à Paris et j’étais préparée pour être seconde gardienne. Mais, une fois ici, c’est beaucoup plus dur que prévu. Les premiers jours ont été une torture. Puis, j’apprends le matin du match face à l’Allemagne que je vais jouer. Pas simple. Mais je n’avais pas le choix car Elodie était malade. Et puis 2 jours après, le quart de finale. Est-ce qu’elle est toujours malade ? Je l’apprends de nouveau le matin même. Apparemment, elle n’est pas à 100% et il faut jouer. Et 3e fois, la même situation. On se sent dans un rôle d’imposteur. De ne pas être légitime. De ne pas avoir le droit d’être sur le terrain. Et je me suis moi-même torturé également car j’ai lu les commentaires sur les réseaux sociaux. »

Une très mauvaise idée…
« Exactement mais j’aime bien me faire mal (Sourire). Mais ce n’était pas une super idée. Je me suis posé énormément de question sur ma légitimité. Mais cela m’a donné un boost. Tu ne joues plus que pour toi mais aussi pour elle. J’ai pris Elodie dans mes bras après le match et je me suis excusée de ne pas lui avoir offert une médaille. »

Demain, vous débuterez un nouveau chapitre de votre vie.
« Je suis prête même si on ne dirait pas vu les larmes. Elle commencera dès lundi. Je suis tellement fière d’avoir pu décider quand je mettrai un terme à ma carrière. La suite sera tout aussi génial que le chapitre précédent. J’ai hâte de pouvoir vivre tous ces moments avec ma famille. »

Propos recueillis par Laurent Toussaint (à Paris).

Photo : Dirk Waem (Belga).

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