Le jour où les Red Lions sont retombés sur terre

Partis à Rio avec le mandat d’enfin décrocher un grand résultat aux Jeux olympiques, les hockeyeurs belges vont vivre, en ce chaud mois d’août sud-américain, la quinzaine la plus riche de leur carrière. Défiant les pronostics les plus optimistes, ils renversent tout sur leur passage et se hissent, haut la main, dans une finale qui leur semble promise, face à la formation argentine. Mais la fête s’arrêtera là pour les Red Lions. La médaille ne sera qu’en argent…

Cette première finale olympique pour le hockey belge devait être le couronnement d’un tournoi en tous points exemplaires. La consécration après des années de labeur et de sacrifices. L’aboutissement d’un projet cohérent de dix ans mis sur pied par une fédération ambitieuse. Mais, face à l’Argentine, dans le stade carioca de Deodoro rempli à ras bord, pour la première fois de cette quinzaine, les Red Lions n’ont rien pu faire pour empêcher les Sud-Américains de décrocher la première médaille d’or de leur histoire dans la discipline.

Pourtant, rien ne semblait pouvoir arriver aux protégés de Shane McLeod, réellement impressionnants depuis l’entame de la compétition, et le cinglant 4-1 infligé à leur bête noire britannique en ouverture du tournoi. Après six victoires convaincantes et une seule petite défaite, en dix jours, les hockeyeurs belges étaient prêts à entrer par la grande porte au panthéon du sport belge. Mais ce jeudi 18 août, sous un ciel gris rappelant notre plat pays, les Argentins ont simplement surclassés les Belges dans tous les domaines.

Dans les tribunes, d’abord. Les aficionados de l’Albiceleste, en surnombre, ont vocalement dominé les débats, étouffant au passage les encouragements de la petite colonie de supporters noire-jaune-rouge. Ce stade temporaire de 15.000 places niché dans la banlieue de Rio a, durant quatre quarts-temps, pris de véritables allures d’enceinte de football. Dans l’espace presse, ensuite, il a également fallu jouer des coudes pour accéder aux précieux pupitres. Les Argentins ont débarqué en masse, plus de deux heures avant le coup d’envoi, et ont envahi, au sens propre, les rangées destinées aux journalistes alors que, durant l’ensemble du tournoi, celles-ci étaient restées bien trop souvent clairsemées. Enfin, sur le terrain, malgré un début de match tonitruant et un but rapide de Tanguy Cosyns, les Lions, pourtant majestueux et quasi intouchables durant ces dix derniers jours, ont paru plus empruntés et plus fébriles que jamais. Comme incapables de trouver la parade face à un système argentin bien huilé et terriblement bien organisé.

La fierté cède le pas à la déception

Au coup de sifflet final (défaite 2-4), le camp belge s’effondre littéralement. Les joueurs sont submergés par l’émotion. Aux larmes de joie et embrassades, suite à la demi-finale remportée avec panache face aux Pays-Bas, 48 heures plus tôt, succèdent une tristesse infinie et une déception intarissable. La médaille est « seulement » en argent. Mais elle reste pourtant une véritable consécration. La cérémonie protocolaire permet à certains de retrouver leurs esprits et de prendre conscience du moment historique que vit le hockey belge avec cette remarquable 2 e place sur le podium. Toutefois, pour d’autres, comme Arthur Van Doren ou Sebastien Dockier, la tristesse prend le pas sur la fierté.

Au moment de pénétrer dans la zone mixte, les Lions lâchent une nouvelle fois la pression au moment de rencontrer les journalistes belges présents à Deodoro. Les regards sont vides et les yeux sont humides. L’émotion est tangible. Mais après une accolade amicale, un sourire complice ou un petit mot de réconfort, les Lions retrouvent rapidement leur capacité d’analyse. Personne ne fuit pourtant ses responsabilités. Tom Boon, Gauthier Boccard, Loïck Luypaert ou Tanguy Cosyns répondent aux nombreuses sollicitations. Chaque mot est pesé mais conserve cet arrière-goût désagréable d’inachevé. « On a surtout failli défensivement. » A quelques mètres d’eux, Luca Masso flotte, lui, sur son petit nuage, sa médaille d’or autour du cou.

La nuit est tombée sur Rio. Aux côtés de mes collègues, je fignole mon dernier papier. Les supporters argentins n’ont pas encore quitté les travées du stade et entament une fête qui durera toute la nuit. Les Olé Olé Olé Olà Argentina continuent à résonner tout autour de nous. Ceux-ci font mal aux tympans… mais également, et surtout au cœur !

Laurent Toussaint, In le Soir, mercredi 4 janvier 2017.

Photo : ARBH/World Sport Pics.

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