Après 7 mois d’interruption, la Pro League redémarre enfin mardi et mercredi, avec le déplacement de la Belgique en Allemagne. Les rencontres se dérouleront à huis clos avec des enjeux extrêmement différents pour les dames et les messieurs. Des duels qui permettront avant tout de jauger le niveau actuel des deux équipes sous le regard attentif de Xavier Reckinger.
Xavier Reckinger, prêt à retrouver, enfin, la compétition et la Pro League ?
« Oui, même si je ne sais pas trop à quoi m’attendre puisque cela fait 6 mois que je n’ai plus eu l’ensemble de mon groupe à disposition. Nous nous sommes retrouvés jeudi pour la toute première fois. Les joueuses ont naturellement continué à travailler en groupes répartis par région grâce à notre structure décentralisée. Mais l’envie est énorme de reprendre le collier et de pouvoir disputer, à nouveau, des rencontres de haut niveau. »
Ce n’est pas un secret, vous n’êtes pas un grand fan de la Pro League. Vous aviez déclaré à l’Euro « qu’il ne s’agissait pas d’un bon développement pour le hockey ». Vous confirmez ?
« Les championnats européens souffrent alors qu’ils restent le socle de la discipline. Le calendrier international prend une place de plus en plus importante et les compétitions domestiques doivent à présent se contenter d’une période de 5 mois pour 9 auparavant. Il y a également des aspects positifs, mais il est essentiel de continuer à peaufiner la formule pour améliorer encore le format. »
Dans quelques jours, vous affronterez la Belgique. Ces matchs conservent une saveur particulière pour vous ?
«
Évidemment. J’ai porté le maillot des Red Lions durant 15 ans et je suis belge. Quand j’ai commencé à coacher au Victory puis au Braxgata, je me suis toujours dit qu’un jour, je dirigerai ces filles en équipe nationale. Malheureusement, ce n’est pas le cas pour de nombreuses raisons. Je possède une solide affinité avec ce groupe vu que j’ai été assistant chez les Red Panthers et surtout car j’ai coaché beaucoup de joueuses en club et en U21 comme Barbara Nelen, Louise Versavel, Lotte Englebert ou Justine Rasir. »
Justement que pensez-vous de cette équipe ?
« En voilà une question bien difficile. La Belgique est en pleine reconstruction après l’échec de sa qualification olympique en Chine où s’était réellement du 50/50. Elles ont bien entamé la Pro League en janvier car elles évoluaient sans pression. Honnêtement, ce groupe possède un énorme potentiel. Mais il faut l’exploiter et le développer. C’est un travail de longue haleine. Il faudra voir les progrès engrangés avec le temps. Le plus important est clairement de parvenir à gérer la pression inhérente à ce niveau. C’est une des clés de la réussite. Mais il faut arrêter de comparer les Panthères aux Red Lions. Le projet des garçons est arrivé à maturité et il est extrêmement unique. Les filles sont à un tout autre stade dans le processus. Il y aura encore des hauts et des bas. Mais il faut faire confiance à la Fédération et au staff pour effectuer les bons choix. »
Est-ce que Xavier Reckinger coachera un jour les Red Panthers ou les Red Lions ?
« Ce n’est pas à moi d’en décider même si l’envie est énorme. Je l’affirme très ouvertement. C’est l’un des objectifs de ma carrière. J’espère que l’occasion se présentera un jour. Mais ce n’est pas pour demain vu que l’on connaît déjà le nom du successeur de Shane McLeod pour le prochain cycle olympique. Actuellement, je suis sous contrat avec la Fédération allemande jusqu’au Jeux de Paris et je verrai ce qui se présente à moi dans le futur. Il faudra que cela se présente au bon moment dans ma vie professionnelle et familiale. De toute manière, c’est encore un peu tôt pour les Lions car je connais encore trop de joueurs. De plus, j’estime que je dois encore me développer avant de pouvoir coacher les numéros 1 mondiaux. »
Quels sont les objectifs pour ces prochains mois malgré les incertitudes ?
« Les JO restent le Graal absolu. C’est le seul et unique objectif pour 2021. Mais nous allons d’abord reconnecter le groupe et nous adapter à la nouvelle situation. Il faudra créer une nouvelle routine et jalonner le parcours d’objectifs intermédiaires. En janvier, nous commencerons alors la véritable préparation pour Tokyo. Quel sera notre ambition aux Jeux ? Il y a quelques mois, nous étions sur une vague positive mais toutes les cartes ont été remélangées. L’or est à notre portée même s’il faudra que tout s’aligne parfaitement durant le tournoi olympique. »
Un dernier mot sur les Red Lions. Peuvent-ils réaliser la passe de trois : Coupe du monde, Euro et enfin les JO ?
« Évidemment. Et ils feront peut-être même plus en remportant un nouveau Championnat d’Europe avant les Jeux. Ils sont loin devant leurs adversaires et ils constituent une référence pour les autres nations. Ils font preuve d’une maturité exceptionnelle. À mon époque, nous avons trop douté sur nos capacités. En 2012, à Londres, nous aurions déjà pu revendiquer mieux que cette 5e place. Nous ne nous rendions pas encore compte à quel point nous pouvions être forts. Cette génération est inspirante pour les jeunes et elle n’a pas encore terminé d’écrire l’histoire. »
Propos recueillis par Laurent Toussaint, In Le Soir samedi 20 septembre 2020.